L'Espion dans les cours des princes chrétiens

Dans cette savoureuse chronique par lettres, Marana fait découvrir et juger par un Oriental l'histoire et les mœurs de l'Europe, et plus particulièrement de la France de son temps. C'est L'Espion turc, dont le premier volume parut en 1684, et son immense succès de librairie qui donnèrent à Montesquieu l'idée de ses Lettres Persanes, parues en 1721. L'Espion turc, ce sont les premières " lettres persanes ", utilisant pour la première fois le procédé littéraire du décalage de l'observateur d'une autre culture. Les traditions, les coutumes, les religions européennes sont ainsi vues de manière nouvelle, souvent caustique, toujours ironique et enjouée. Mais l'Empire ottoman, le monde arabe et les traditions juives n'échappent pas non plus à sa critique, voire à sa moquerie. L'Espion turc était d'ailleurs le livre de chevet du curé Meslier, qui le cite fréquemment dans son Mémoire contre la religion. On ne sait pas grand chose de Marana. Il semble qu'il était un noble génois, probablement marrane, c'est-à-dire d'origine juive, vivant en France après avoir participé en 1672 à une conjuration manquée destinée à faire passer la ville de Savone sous la domination des ducs de Savoie. Son Espion Jure est le seul ouvrage que l'on connaît de lui, et il connut de très nombreuses rééditions au XVIIIe siècle. Il n'avait jamais été réédité depuis. Nous avons basé notre édition sur celle parue à Cologne chez Erasme Kinkius de 1739 à 1746. En effet, le succès de cette chronique fut tel qu'aux trois premiers volumes originaux parus en 1739 écrits par Marana s'ajoutèrent quatre autres volumes pour satisfaire le public, mais qui furent écrits par d'autres, restés inconnus à ce jour. Voici enfin rassemblés en un seul volume, avec les illustrations de l'époque, " les trois premiers tomes authentiques de L'Espion turc dans les cours des princes chrétiens.