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Ce roman, c'est l'histoire de Charlie Traoré, un gamin (dix ans), black d'origine malienne, adorable, vivant en banlieue, entre la Tour Rimbaud et la Tour Simone de Beauvoir, et dont tout l'univers se résume aux copains, à une amoureuse prénommée Mélanie, à son frère drogué, et à sa mère surtout - qui, au début du livre, est "appréhendée" par la police car ses papiers ne sont pas en règle. Pendant toute cette journée (les chapitres du livre, d'ailleurs, se contentent d'être titrés par l'heure qui tourne), Charlie va errer dans sa cité.
Il va chercher son frère Henry, rendre viste à des braves gens, frôler des voyous, jouer au foot, sécher l'école, rêver, suivre ses folles associations d'idées, ses digressions d'enfant-adulte, attendre sa mère, si douce, si aimante... Mais ce roman, c'est surtout une langue, un style, une vision innocente du monde. Ici, c'est Charlie qui parle, pense, regarde - et il est alors difficile de ne pas évoquer à son sujet le légendaire Attrape-coeur de Salinger.
Car le petit Charlie est vraiment attachant et le regard qu'il pose sur sa "cité" sordide et magnifiée est, à chaque ligne, rempli de drôlerie et d'éblouissement. Au début du livre, il croit que Rimbaud n'est qu'une Tour. A la fin du roman, il saura que c'était un poète qui dit des choses qui lui semblent vraies et proches. Son Odyssée de l'aube jusqu'au soir, est de celles qui ne s'oublient pas. Pas l'ombre d'un misérabilisme ici : un enchantement de tendresse et d'humour.
Le coeur en dehors
Un véritable bijou, qui n'est pas sans rappeler les plus belles pages de "l'autobiographie d'une courgette", "Alphonse" ou encore Edgar Mint, ces romans qui donnent la parole à de jeunes garçons plein de lucidité et de bon sens, mais dont le regard sur le monde est encore préservé par la naïveté touchante de l'enfance...
Charlie a 10 ans, des idées plein la tête, une curiosité de tout, un sacré bagoo et la langue fleurie des gamins des cités, qu'il mêle selon l'humeur à des termes savants glanés dans le dictionnaire. Peut être est-ce le parrainage des tours de la cité, qui portent les noms d'écrivains célèbres. Ce sens des mots fait tout le charme du roman, et l'on ressent l'auteur profondément attaché à son personnage. Lorsque sa mère, sans papiers, est conduite dans un centre de rétention, l'univers de Charlie bascule. Sans pathos et sans facilité, sans pour autant tomber dans le militantisme, Samuel Benchetrit nous permet de partager la détresse de ce jeune garçon face à une situation intolérable. Autour d'un thème résolument d'actualité, un roman plein d'humanité et d'humour à découvrir absolument.