APOLLINAIRE ET SES RECITS

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Daniel Delbreil - APOLLINAIRE ET SES RECITS.
Le premier mérite d'Apollinaire et ses récits est de venir combler une lacune qui, au fil des années, devenait de plus en plus insupportable. Depuis... Lire la suite
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Résumé

Le premier mérite d'Apollinaire et ses récits est de venir combler une lacune qui, au fil des années, devenait de plus en plus insupportable. Depuis l'Apollinaire prosateur d'André Fonteyne consacré à L'Hérésiarque et Cie en 1964, aucun ouvrage sur la prose fictionnelle d'Apollinaire n'avait été publié, a fortiori aucun ouvrage de synthèse sur l'ensemble de cette production narrative. Ces récits, pourtant, contribuent à la "renommée" de l'écrivain, mais ils le font de manière très différenciée.
Si les contes sont généralement appréciés, ils ne sont pas placés sur le même plan que les poèmes. Les autres textes fictionnels, très hétérogènes, déroutent ou déçoivent, parce qu'ils sont inachevés, inclassables, pornographiques ou parce que, très marqués par la réécriture, ils semblent n'être que d'aimables ouvrages de second rayon. Apollinaire et ses récits montre que ce conteur et romancier, comme bon nombre de ses personnages, est un "cas" qui défie les examens simplistes.
En marge des écoles, en marge des genres, et pourtant nourri par des siècles de tradition narrative, il s'est voulu pleinement prosateur sans cesser d'être poète. Il a conservé les formes canoniques, mais pour les transformer de l'intérieur. Dans ses œuvres majeures, il n'a pas hésité à rompre avec les exigences de la vraisemblance, de l'ordre, de l'harmonie ou du bon goût. Apollinaire serait, dans son jeu subtil avec les règles ou dans ses infractions et transgressions brutales, à l'image des premiers héros de ses récits courts, un hérésiarque et même, selon un néologisme proposé en conclusion, un héréciarque.
La thématique de l'hérésie renverrait métapoétiquement à des défis aux normes du récit : prosateur et créateur, Apollinaire chercherait à inventer un récit régénéré sur lequel passerait le souffle d'un " Esprit nouveau ". Pour rendre compte de ces textes narratifs multiformes, il fallait en étudier précisément les structures, ce qui est fait dans le présent ouvrage avec toute la rigueur qu'implique l'approche poéticienne.
Apollinaire et ses récits se propose d'analyser, selon un plan volontairement simple, marqué par des titres sobres et brefs comme ceux du "Poète assassiné", les principaux points d'ancrage de celte prose d'imagination : la narration, l'espace-temps, le nom, le portrait ou les actions. Cependant, différentes méthodes sont sollicitées pour explorer cet univers apollinarien. Les études linguistiques, sémiotiques, narratologiques qui forment la base des développements, n'interdisent pas des réflexions d'ordre plus historique, thématique ou symbolique.
La démarche, en effet, se veut rigoureuse, mais sans raideur ; la précision des analyses, de plus, n'y est pas l'ennemie du plaisir et du jeu. Ce serait trahir les contes et les romans d'Apollinaire que de négliger la jubilation de l'écriture, la force comique de certains textes, de parler trop sérieusement de tant de séquences spirituelles ou hardies du " Poète assassiné " comme des Onze mille verges.
Puisque les tons d'Apollinaire sont passablement mêlés, puisque, à tout moment, une pirouette verbale peut venir altérer la beauté d'une émotion ou l'intensité d'un drame, puisque, dans cette œuvre, l'inattendu et le cocasse sont toujours sur le point de surgir, il fallait que l'écriture critique, toute de docte exigence, pût laisser épisodiquement la place à quelques saillies, à quelques traits d'humour, à quelques calembours, à quelques phrases " obliques ".
On appréciera donc, comme des pauses ou des respirations très plaisantes dans des pages très denses, ces séquences qui n'hésitent pas à rechercher l'amusement du lecteur. La verve d'Apollinaire est contagieuse, et l'on ne se plaint pas de la retrouver dans l'analyse de certains noms propres et de leurs phonèmes privilégiés, ou bien dans l'étude de quelques passages de romans érotiques (ah ! les plaisirs, à l'envers, d'un escalier ou les surprises, poétiques, d'un chemin de fer...). S'il y a l'ordre rigoureux de l'exégèse d'une part et les agréments du jeu d'autre part, il y a encore, dans Apollinaire et ses récits, le plaisir de l'aventure critique, de l'hypothèse, de la conjecture.
L'esprit d'analyse qui marque les études poéticiennes s'efface alors devant l'esprit de finesse, l'intuition, la proposition incertaine mais séduisante. L'étude des sources culturelles des prénoms est l'un de ces moments où l'on suit avec étonnement le critique dan, l'exercice délicat de la supposition et où l'on finit par se laisser convaincre par l'idée que le prénom chrétien, de façon cryptée et souvent ludique, imposerait un modèle au personnage qui le porte.
L'étude du portrait et de sa rhétorique est un autre passage alerte où l'interprétation se libère ; de même, cette dernière section sur le "narrarchitecte" ou il est suggéré que les recueils de contes seraient rigoureusement construits et, en ce qui concerne L'Hérésiarque et Cie, construit comme un grand poème de vingt-quatre "vers-contes" avec ses strophes et ses rimes. Apollinaire et ses récits est un ouvrage qui fait alterner micro-lectures et les vues d'ensemble, la prudence critique et l'audace interprétative, les exégèses minutieuses et les études malicieuses.
Malgré son ampleur, ce livre ne prétend pas épuiser les différentes questions qu'il évoque. Il laisse constamment entendre que l'analyse pourrait être poursuivie, que d'autres livres, se fondant sur d'autres méthodes critiques ou voulant aller plus loin sur certains des thèmes abordés, sont à écrire. Tel qu'il se présente, cet ouvrage met à jour les connaissances sur Apollinaire conteur ou romancier et met au jour les "significations multiples" d'une œuvre de fiction pleine de surprises.
S'il garde la ligne directrice de l'"hérécit", Apollinaire et ses récits se préserve de la tentation réductrice de l'interprétation unique. Il invite à une lecture renouvelée de L'Hérésiarque et Cie, du Poète assassiné et des autres contes, à une découverte des romans méconnus, attachants dans leur imperfection même, à une redécouverte des romans pornographiques qui, par-delà leurs excès - ou, justement, dans leurs excès - se révèlent comme des œuvres authentiquement apollinariennes. Après avoir parcouru toutes ces pages, le lecteur qui s'efforce de comprendre les ressorts de la création narrative d'Apollinaire pourra penser à ce vers de "Lettre-Océan" : "des clés j'en ai vu mille et mille". GIOVANNI DOTOLI et SERGIO ZOPPI

Caractéristiques

  • Date de parution
    06/10/1999
  • Editeur
  • ISBN
    88-8229-134-0
  • EAN
    9788882291341
  • Présentation
    Broché
  • Nb. de pages
    743 pages
  • Poids
    1.145 Kg
  • Dimensions
    17,1 cm × 24,0 cm × 3,8 cm

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À propos de l'auteur

Biographie de Daniel Delbreil

Daniel Delbreil est un ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure de Saint-Cloud. Agrégé de Lettres et Docteur d'Etat, il est actuellement maître de conférences à l'Université de la Sorbonne Nouvelle-Paris III. La plus grande part de son travail critique porte sur Guillaume Apollinaire, et en particulier sur les contes et les romans, mais il s'intéresse aussi à Raymond Queneau, à qui il a consacré de nombreux articles.

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