Bien réussies ces nouvelles... Il y a des lectures qui vous prennent par la main, ce livre en fait partie. Je ne saurais pas résumer ces 250 pages très diverses, voici quelques extraits :
(Ni Chien ni Louve)
"Elle souriait, de plaisir ou de timidité déguisée. Elle me dit sans ambages :
— Je suis un peu amoureuse de vous, je dois avouer, d’une façon qui m’est propre, comme d’un père désiré mais strict qui m’interdirait tout rapport physique. Je lui serais très attachée, et pleine d’envie d’accomplir cet acte, mais respectueuse de son choix.
— Pour moi, répliquai-je
en faisant un considérable effort pour trouver le ton juste, il n’entre aucune nuance incestueuse dans notre relation : vous êtes simplement une très jeune femme que j’apprécie beaucoup, une amie dont je voudrais me rapprocher encore, mais les voies pour cela ne sont pas tracées d’avance…"
(Le Palais d'aujourd'hui)
"… j’ai eu l’impression qu’ils pouvaient, en conférant à leur présent suffisamment d’intensité, atteindre à un sentiment d’éternité, de temps immobile : chaque ''aujourd’hui'' se dilate alors tel un palais immense, un royaume infini. Comme si la matrice de leur
vie était entièrement différente de la nôtre. Comprends-tu ?"
(Les regards pâles)
"Bien sûr, me dit-il, vous avez raison, c’est une incohérence. Les yeux bruns sont transmis des parents aux enfants, c’est la règle. Mais il y existe scientifiquement des exceptions, des mutations qu’on ne comprend pas encore. Des cas d’oeil bleu dominant l’oeil foncé ont été signalés en Orient. Ainsi, il y a bien chez nous quelque anomalie, admit-il, mais moi, je ne peux pas l’expliquer. Il répondit ensuite à mes questions par d’autres : quel âge as-tu maintenant ? Bientôt soixante et quinze, lui dis-je. Es-tu en paix… ? J’ai été déshonnête, débauché, marmonnai-je ; et j’admis n’avoir aucun crédit à attendre. Je n’étais pas venu pour être jugé, ni palabrer sur la morale. Il insista : un moment vient où il ne reste qu’à faire un examen de conscience..."
J'espère vous avoir donné une petite idée. J'ai vraiment envie de partager le plaisir de ce bouquin.
Rafraîchissant et "feel good" (excusez mon anglicisme)
C'est comme ces films qu'on dit "feel-good movie", qui réchauffent le cœur... On s'imagine femme (et alcoolique) en lisant une de ces nouvelles - qui finit pourtant très bien. On se voit père célibataire dans une autre, avec ce malaise qui n'a pas de nom, mais bien réel, et dont le mystère se résout à la fin. Chaque page, chaque phrase a son charme, voilà comment je décrirais le bouquin, et en le refermant on est mieux qu'avant !