Voltaire (1694-1778) : C'est l'aîné de nos trois auteurs. Lorsqu'il rédige l'Histoire des Voyages de Scarmentado écrite par lui-même, il est âgé de 62 ans et il a connu les expériences les plus diverses, de l'exil aux honneurs. Le dilettante des premières années, historien et dramaturge, académicien et poète officiel, se consacre désormais exclusivement au combat philosophique. Après avoir écrit Zadig (1747), un conte aux couleurs orientales, il rejoint la cour du plus "éclairé" des princes d'Europe, Frédéric Il de Prusse.
Il publie Micromégas (1752), inaugurant ainsi la série des héros voyageurs. Mais l'amitié avec Frédéric Il se distend : Voltaire rejoint d'abord l'Alsace où il reprend sa plume d'historien avec le monumental Essai sur les Moeurs, puis enfin la République de Genève. C'est là, dans sa propriété des Délices, que les plus rudes combats de sa vie s'engagent. Pour défendre les positions de l'Encyclopédie, il bataille ferme contre Rousseau, les protestants genevois et les jésuites.
Révolté par les tueries de la guerre de Sept ans, il déploie sa verve pamphlétaire contre la complicité meurtrière des puissants et de l'Eglise. Scandalisé par l'aveuglement des "optimistes" lors du tremblement de terre de Lisbonne (1755), il rédige le plus abouti de ses contes : Candide (1759). Entre temps, il invente le personnage de Scarmentado, héros voyageur embarqué dans un tour du monde des intolérances, sorte de frère aîné de Candide.
Denis Diderot (1713-1784) : Il a 57 ans lorsqu'il écrit Les deux Amis de Bourbonne. Le conte sera à nouveau publié en 1773, sous une forme légèrement modifiée. En 1747, Diderot s'est vu confier l'entreprise de sa vie : la direction de l'Encyclopédie, une tâche monumentale dont les enjeux philosophiques et politiques sont au coeur de l'esprit des Lumières et qui l'occupera jusqu'à la fin de ses jours.
Entre 1749 et 1762, il connaît la censure et l'emprisonnement pour avoir contrevenu aux règles de l'édition, il écrit des drames bourgeois, diffuse ses critiques esthétiques dans les Salons, se lie avec Sophie Volland — son unique véritable amour —, écrit La Religieuse, un roman sulfureux, Le Neveu de Rameau, un dialogue philosophique énigmatique. Ce sont des années ce lutte pour les Lettres et pour le succès des idées nouvelles, au cours desquelles l'écriture des contes offre quelques moments de malice.
Les deux Amis de Bourbonne sont ainsi rédigés lors d'un séjour de Diderot en compagnie d'une de ses anciennes maîtresses, Mme de Maux. Le conte témoigne de préoccupations moins militantes, mais empreintes de sensibilité. Paul-Henri Thiry D'Holbach (1723-1789) : Né en Allemagne, cet homme de lettres noble et fortuné s'intéresse d'abord à la technologie du fer et de la fonderie. Entouré de nombreux amis (Buffon, Rousseau, Diderot), il exerçe un rôle considérable dans la propagation des idées les plus hardies de son époque.
Il devient le mécène avisé de l'Encyclopédie, contribuant à près de 400 articles sur la chimie et la minéralogie. Prudemment, il ne les signe pas de son nom, réservant au salon qu'il anime entre 1759 et 1778 l'aveu et la diffusion de ses convictions athées et matérialistes. C'est dans ce cadre qu'il rédige en 1770 — sous un pseudonyme — Le Système de la nature, un essai antireligieux dans lequel il développe ses principes les plus radicaux.
En 1772, Le Bon Sens, d'où est tiré le Conte oriental, reprend les mêmes idées.
