En cours de chargement...
Arshile Gorky (né Vosdanig Adoian), L'artiste et sa mère, "de la photo au tableau". En 1912, la photographie avait été prise pour le père absent (voir ci-contre). En 1926, le garçon devenu artiste est exilé aux Etats-Unis, survivant du génocide des Arméniens dans lequel sa mère a péri. La transformation de l'image en noir et blanc en tableau aux plans colorés figés est celle du passage de la vie à la mort par l'extermination.
La solennité affectueuse de la photographie s'est changée en raideur, les yeux sont enfoncés dans les orbites, il n'y a plus de tentures. Les mains de la mère, les premières à avoir touché l'enfant, à susciter ses affects, ont disparu, sa robe à fleurs est transformée en linceul blanc. La fenêtre ouverte sur les paysages d'Arménie est devenue un rectangle noir, fermé, vide. Fantômes pétrifiés du génocide.
Annette Becker, professeure émérite à l'université de Paris-Nanterre, vice-présidente du Centre international de recherche de l'Historial de la Grande Guerre. Ses recherches portent sur les guerres du XXe siècle, leurs mémoires et leurs oublis, particulièrement sur les génocides des Arméniens, des Juifs et des Tutsi du Rwanda, ainsi que sur les artistes, les écrivains, les intellectuels en guerre et sur les musées d'histoire où les récits des violences et des crimes de masse sont mis en scène.
Elle a notamment publié : Voir la Grande Guerre, un autre récit, 1914-2014. Armand Colin, 2014 : Messagers du désastre, Raphaël Lemkin, Jan Karski et les génocides, Fayard, 2018 (Messengers of Disaster, The University of Wisconsin Press, 2021). Elle a aussi co-dirigé avec Octave Debary Montrer les violences extrêmes, Créaphis, 2012.