Raoul Ubac - Films 1963-1972

A propos du film, par Raoul Ubac. " Ce n'est pas un film didactique rasoir, ni même rétrospectif, mais un film où les images se suffisent à elles-mêmes, un film à propos de mes choses par apport aux éléments. Mes tracés sur la plage y sont mon unique intervention personnelle, c'est une image : l'élément, ici la mer, efface le dessin que j'ai fait. Les choses se perdent, renaissent et meurent à nouveau. Il y a comme un cycle qui se produit. Un dessin dans le sable, c'est presque symbolique : le retour éternel des choses ". L'air, l'eau, la terre, le feu : c'est à partir des quatre éléments, dans toutes leurs nuances possibles que ce film a été réalisé. Ubac gravant des signes sur le sable d'une plage puis la marée monte et les efface lentement ; Ubac achevant une sculpture puis l'ensevelissant dans la terre ; Ubac dressant une stèle puis l'enflammant et la regardant brûler : autant d'images saisissantes qui, dans leur simplicité, évoquent des rêveries bachelardiennes de l'élémentaire où le réel se retrouve investi de toute sa charge mythique. La fécondité, l'existence antérieure, le temps cyclique, la vie qui renaît et la mort : autant d'éléments qui sont ceux-là mêmes dont la sculpture d'Ubac semble faire la matière de sa genèse et tirer sa force de leurs qualités. Le son lui-même participe à cette incantation née au cœur du silence et de la solitude dont l'œuvre même semble être le produit naturel, le résidu ou le résumé essentiel : bruit d'une pluie fine sur un toit d'ardoise, chuchotis discontinu d'une conversation entre Ubac et le poète André Frénaud, ressac des vagues, craquements de la sculpture qui brûle, raclement sourd du ciseau sur l'ardoise : un accompagnement dont l'œuvre paraît être à la fois ou successivement le produit et la cause.