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J'ai longtemps laissé croire que ma mère était encore en vie. Je m'évertue désormais à rétablir la vérité dans l'espoir de me départir de ce mensonge qui ne m'aura permis jusqu'alors que d'atermoyer le deuil.
Après vingt-trois ans d'absence, Alain Mabanckou retourne à Pointe-Noire, ville portuaire du Congo. Entre-temps, sa mère est morte, en 1995. Puis son père adoptif, peu d'années après. Le fils unique ne s'est rendu aux obsèques ni de l'un, ni de l'autre.
Entre le surnaturel et l'enchantement, l'auteur nous ouvre sa petite valise fondamentale, celle des années de l'enfance et de l'adolescence dans ses lieux d'origine.
Au moment de repartir, il se rend compte qu'il n'est pas allé au cimetière.
Sans doute était-ce inutile. Car c'est ce livre qui tient lieu, aussi, de tombeau. Et de résurrection.
Alain Mabanckou est poète, essayiste et l'auteur de plusieurs romans dont Verre Cassé (Seuil, 2005), Mémoires de Porc-épic (Seuil, prix Renaudot 2006) et Demain j'aurai vingt ans (Gallimard, 2010). L'ensemble de son ouvre a été couronné par l'Académie Française (Prix de Littérature Henri Gal, 2012).
Il enseigne la littérature francophone à l'Université de Californie-Los Angeles (UCLA).
LUMIERES DE POINTE-NOIRE
Ce livre est en quelque sorte le pendant du précédent, puisque après avoir utilisé ses souvenirs d'enfance dans Demain j'aurai vingt ans, l'auteur nous invite ici à partager son séjour de quelques semaines à Pointe-Noire où il a été invité en tant qu'écrivain. L'occasion pour lui de rendre hommage à sa maman et à son papa adoptif, décédés tous les deux. Il revient donc sur les traces de son enfance et dresse un portrait tout en tendresse de cette ville qui a changé et où tout semble avoir rétréci. C'est que notre "petit gars" n'est plus un jeune garçon mais bel et bien un adulte, changement de perspective donc, et puis 23 ans d'absence, ça ne peut que falsifier un peu les souvenirs..
Pourtant Alain Mabanckou retrouve peu à peu ses marques. Déçu par les retrouvailles avec certains de ses demi-frères ou demi-soeurs, il est cependant ému et touché par la myriade toute neuve de neveux et nièces qui gravitent autour de lui et qui le submergent de demandes diverses, de la plus insignifiante à la plus farfelue ! Il faut dire que "l'américain" est l'image même de la réussite (A. Mabanckou enseigne à l'université de Californie-Los Angeles), de bonnes grâces il se déleste aussi à l'occasion de quelques francs CFA...Il y a forcément un décalage entre sa vie aux Etats-Unis et la vie de sa famille congolaise. Mais (et c'est bien la force de ce récit) jamais il ne tombe dans le misérabilisme. Oui ce pays a souffert, il y a eu des luttes fratricides et la présence de pétrole dans le sud n'a pas incité les puissances occidentales à calmer le jeu. La population n'est certes pas très riche et l'auteur n'occulte pas non plus les quartiers les plus pauvres où la prostitution règne, ainsi que les hôpitaux qui se transforment trop facilement en mouroirs. Toutefois, il sait nous parler aussi des petits bonheurs qui ont fait son enfance et qui font celle des enfants Ponténégrins actuels. Un hymne à la vie donc et à l'importance de la famille et de la solidarité. Un retour nostalgique mais salutaire pour un homme qui n'avait pas dit encore adieu aux héros de son enfance....