Journal d'une teigne

Mardi 15 août Hermine chérie, Hermine, petit rongeur tout en longueur, dont la fourrure blanche... Non, je blague, en fait j'ai un trac monstre, toi, c'est ta première lettre d'amour, moi, c'est ma première lettre tout court. C'est une lettre d'amour, bien sûr. Je sens en t'écrivant, je sens tout autour de moi la fraîcheur de la grotte et le sel de ta peau, je te vois les yeux fermés dans le noir et le sourire, ô ton sourire.
Ça ne peut pas être une séparation, bien sûr c'est beau, si c'est une séparation, mais beau comme un Requiem de Mozart, je suis trop jeune pour le Requiem, je serais plutôt la Symphonie du nouveau monde, je ne t'ai pas dit pour pas t'effrayer, mais j'aime bien la musique classique. Hé ben, tu serais pas un peu surdoué, toi ? Je n'ai jamais lu quelque chose d'aussi beau, à part Sartre, peut-être.
Tu vas même parvenir, avec ta petite fouine de luxe, à me faire aimer mon prénom. Pas de banlieue, pas de famine, des parents aimants, c'est l'histoire d'une fille, le parcours d'une femme ordinaire…