La Messiade. Chants I A X - Grand Format

Nourri de piétisme et de rationalisme, Klopstock (1724-1803) publia les chants I à X de la Messiade, vie poétique de Jésus, de 1747 à 1755. La traduction, en prose de bonne tenue, de Mme de Carlowitz fut rééditée maintes fois dans le cours du XIXe siècle, et constitue encore à ce jour une approche irremplacée de cette œuvre oubliée, peut-être parce que, produit de l'Aufklärung, elle contredit l'exclusivisme rationnel qu'on accoutume de prêter à cette époque. " Klopstock a voulu rétablir la religion parmi les hommes et la faire entrer pratiquement dans leur vie ", écrivait A. Bogaert. Or l'appel baroque au sentiment annonce une rupture avec l'ordre rationnel et atteste cette inquiétude, sous-jacente à la démythification, qui animera les déchirements romantiques où elle fera se développer des tendances multiples, du christianisme tourmenté à l'athéisme désespéré du " ciel vide ". Klopstock importe en ce qu'il initie cette évolution dans un effort de restauration rationalisée et passionnée à la fois exprimant le précaire modus vivendi de la culture de son temps. Son influence témoigne de cette importance. Elle fut grande en France, où la Législative le nomma citoyen français en août 1792 - titre que l'auteur résigna ensuite, devant la Terreur et devant l'impérialisme militaire de l'État français. Dans le cours de cette histoire fondamentale pour la culture moderne, la réaffirmation d'une foi chrétienne se voulant alliée au rationalisme dénote en retour le besoin de foi qui accompagnait le progrès des Lumières. Du point de vue poétique, l'ampleur et le lyrisme des temps forts de la Messiade suggèrent la construction et l'emportement d'une apothéose orchestrale.