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Avec Charles Nodier (1780-1844), l'expression homme du livre prend son véritable sens : à la fois écrivain et bibliophile. Aucune des questions que soulève l'existence de l'objet imprimé — source de science et d'erreurs, marchandise, accessoire décoratif ou instrument spirituel — ne lui fut étrangère. Il eut la tentation lui aussi de briller tous les livres. Mais comme un tel slogan ne résout rien, il s'efforça plutôt de retrouver l'essence du Livre en détruisant au besoin ses formes conventionnelles : on peut ainsi analyser l'Histoire du roi de Bohême et de ses sept châteaux.
Cette oeuvre étrange parut précisément dans ce mois de février 1830 qui vit la bataille d'Hernani ; et certains adversaires du romantisme ne manquèrent pas d'associer dans une confuse réprobation le drame de Hugo et la facétie de Nodier. Pourtant si l'un provoqua au théâtre la révolution fracassante (mais éphémère) que l'on sait, il fallut à l'autre beaucoup plus de temps pour révéler son durable pouvoir novateur, qui sera reconnu par André Breton.
L'ouvrage n'était pas seulement le reflet de la bibliophilie facétieuse chère à l'époque romantique ; il inaugurait, dans le cadre de l'austère typographie de Didot, une autre vision de la page. La présente étude porte donc sur la contribution originale de Nodier au mythe du Livre, à travers et par-delà toutes les manifestations pittoresques de ce mythe au XIXe siècle.