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Prenez et mangez, ceci est votre corps. Si, dans Salo ou les 120 Jours de Sodome, Pasolini transpose le roman de Sade dans l'Italie de Mussolini, les quatre fascistes dépeints dans le film ne sont pas des doctrinaires mais des hédonistes cyniques dotés d'esprit et aux idées libertines. Ils vivent entourés d'œuvres d'art avant-gardistes et citent volontiers Baudelaire, Nietzsche et Huysmans. Pasolini suggère ainsi un lien entre le fascisme et le joyeux amoralisme d'une certaine avant-garde artistique.
Il fait également sentir que le fascisme ne doit pas être entendu au niveau de la doctrine, mais compris comme une manipulation libidinale des corps dégradés et fétichisés. Le fascisme devient alors une allégorie de la société de consommation qui exhorte continûment les sujets à épuiser tout le potentiel de plaisir que recèle leur corps. Le sadisme d'une telle société est qu'elle soumet ses sujets à un Autre anonyme qui les terrorise dans l'ordre obscène du plaisir et jouit de l'impasse à laquelle conduit cet ordre.