Communication et Langages N° 164, Juin 2010

Il n'est pas inutile de chercher une explication sémiotique à l'explosion médiatique du culinaire. Un système de base explique son succès au plan du contenu - entre le pratique et le ludique ; entre l'économique et le symbolique - les interrelations prennent leur expansion sous le registre du " symbolique ". La cuisine ou l'art, sinon la manière de s'exprimer, de manifester un goût, l'envie de partager, de transmettre des émotions, des valeurs, autant de dimensions profondes données ici à la louche.
Pour répondre à ces différentes logiques discursives, les médias déploient des stratégies différenciées ou complexes, qui privilégient une dimension ou opèrent un syncrétisme entre la pratique, la technique, le sens esthétique et la sensation gustative. L'espace figuratif du culinaire explique, pour une bonne part, l'ampleur de la médiatisation dont la cuisine et les arts culinaires font l'objet, par leur vertu et leurs potentialités à faire image, à se mettre en scène.
Levier pour l'imaginaire, la petite madeleine est infailliblement liée à des mises en situation mémorables, des mises en images et en mots pour évoquer des souvenirs, des impressions supposées partagées. Dans le contexte médiatique qui est désormais le nôtre, c'est la personnalisation de la recette, avant son appropriation, qui attire notre attention. La recette permet à un sujet de transmettre un objet de valeur à un autre sujet en produisant un programme spécifique.
La valeur associée à cet objet serait la procuration d'un plaisir. Il s'agit de raconter une histoire : soit " par rapport à l'expérience culinaire ", non seulement comme anecdote ou phénomène, mais comme forme de vie idéalisée.