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"Pour les Allemands, 300 Juifs représentent 300 ennemis de l'humanité. Pour les Lituaniens, 300 paires de chaussures et de pantalons." Pour la première fois accessible au public français, ce journal constitue un témoignage unique sur les grandes tueries de masse perpétrées par les nazis et leurs collaborateurs à l'est de l'Europe. Le lieu : Ponary, à 10 kilomètres de Vilnius (Wilno), en Lituanie. Une villégiature idyllique où les Soviétiques avaient creusé sept immenses fosses destinées à stocker du carburant.
Dès leur arrivée en juin 1941, les nazis y voient pour leur part un dispositif idéal pour massacrer des dizaines de milliers de Juifs - hommes, femmes et enfants. L'auteur : Kazimierz Sakowicz (1894-1944), un journaliste catholique polonais qui venait d'emménager par hasard à Ponary, se retrouve ainsi aux premières loges. Posté sur sa véranda ou derrière la lucarne de son grenier, il consigne, jour après jour, les atrocités commises sous ses yeux : le déshabillage des victimes, leur mise à mort, les tortures, les charniers, mais aussi le "sale trafic d'affaires juives" auquel se livrent les voisins...
Sakowicz dissimulait les pages de sa chronique dans des bouteilles de limonade qu'il enterrait dans son jardin. Exhumées après sa mort énigmatique en juillet 1944, elles seront disséminées par le régime communiste dans différents fonds d'archives. Il faudra toute l'opiniâtreté de Rachel Margolis (1921-2015), une ancienne partisane, pour rassembler les fragments de ce journal miraculeusement sauvé.