Les trois textes qui composent ce volume : Le Paris du Second Empire chez Baudelaire (1938), Zentralpark, fragments sur Baudelaire (juillet 1938 à février 1939), Sur quelques thèmes baudelairiens (1939), ne sont que les fragments d'un livre que Walter Benjamin entendait consacrer au poète sous le titre Charles Baudelaire, un poète lyrique à l'apogée du capitalisme, lui-même modèle très précis des Passages parisiens, ouvrage inachevé où, à travers une réflexion sur le XIXe siècle, Benjamin aurait élaboré un nouveau concept d'histoire. Lecture très nouvelle que celle de Benjamin qui se situe aussi bien à l'écart de la critique littéraire que d'une analyse sociologique. " Je veux montrer comment Baudelaire est enchâssé rigoureusement dans le XIXe siècle ", écrit Benjamin à Gershom Scholem. C'est dire que pour lui, il ne s'agit pas de décrypter dans les thèmes baudelairiens les bouleversements économiques et sociaux, mais d'éclairer, d'" illuminer " les uns par les autres. Le développement d'une société industrielle de masse, l'avènement du prolétariat, l'expérience de la foule dans la grande ville, celle du choc, la marchandise, la " perte d'auréole " du poète, autant de situations exemplaires à partir desquelles Baudelaire - le premier à avoir appréhendé la force productive de l'homme réifié -, ici rapproché de Blanqui et de Nietzsche, invente, selon Benjamin, un héroïsme moderne.