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Odradek, pour Walter Benjamin, c'est la forme que prennent les choses tombées dans l'oubli, les choses qui comptent, celles qui touchent à la mémoire des vaincus dans le combat séculaire pour l'émancipation. [...] Quand la seule mesure du temps est le présent perpétuel, rien n'est plus nécessaire, me semble-t-il, que de puiser à cette ancienne mémoire, celle qui couve encore, ne serait-ce que comme espérance de vie décente, sous les ruines d'un monde très méthodiquement déconstruit par ceux-là mêmes qui ont décidé qu'il n'en était nul autre de possible, les maîtres postmodernes du capitalisme réellement existant.
Odradek, c'est une sorte de fil rouge que l'oubli ne cesse d'investir, mais qui, du fait même de son inactualité et à condition de ne pas le perdre, peut toujours servir à tisser de nouvelles révoltes. L'anarchiste oscille, en permanence, entre sa part de rêve - l'optimisme de la volonté - et sa part de doute - le pessimisme de la raison -, mais avec la prescience toujours vive que, dans l'ombre de la nostalgie qui l'anime, peuvent toujours éclore, derrière les murs du réel le plus hostile, de nouveaux assauts contre le désordre du monde.
Le plus souvent, il se trompe, bien sûr, mais c'est beaucoup moins grave, après tout, que d'abdiquer devant la médiocrité de l'époque.