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Lorsqu'il déclarait à Jung au sujet de la psychanalyse : "Nous sommes venus leur apporter la peste", Freud se doutait-il que près d'un siècle plus tard, le discrédit jeté sur la psychanalyse se perpétuerait ? Alors que la métaphore de la contagion s'est faite réalité, les neurosciences prétendent jeter le psychisme aux oubliettes tout en lui substituant un nouveau mythe, celui d'un cerveau aussi lisible qu'une carte routière, et les thérapies des sciences cognitives se veulent brèves, fonctionnelles et adaptées aux nécessités sociales et économiques.
On jette, çà et là, l'anathème sur une psychanalyse jugée obsolète, lorsqu'elle n'est pas accusée des pires maux. L'inconscient freudien aurait-il vécu ? Ce livre fait le pari qu'il n'en est rien, et qu'il importe, plus que jamais, de se retremper aux sources de l'invention freudienne. Il y va d'une révolution conceptuelle, dont on s'attache ici à retracer l'histoire. Ce qui engage à sortir des histoires purement internes du mouvement psychanalytique et à croiser la prodigieuse invention de la pensée freudienne avec les conditions historiques, politiques, économiques, sociales et culturelles qui président à son élaboration.
Ainsi a-t-on retracé les conditions d'émergence en suivant une démarche archéologique, seule à même de faire percevoir les bouleversements conceptuels de cette fin du XIXe siècle et début du XXe où s'élaborent tant de nouveaux savoirs qui fracturent les anciens. Une invention qui continue de faire sens pour notre présent. Que Freud demeure le "destructeur des vieilles tables saintes", L'"anti-illusionniste3 que décrivait Stefan Zweig en 1934, c'est ce que tente, en somme, de montrer ce livre.