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Le 22 octobre 1849, Gustave Flaubert et Maxime Du Camp réalisent enfin un grand rêve : ils s'embarquent pour l'Orient, " seuls, indépendants, ensemble ". Dix-huit mois durant, les deux amis vont être inséparables. Ils ont leur lanterne, une unique pelisse, ils se lavent ensemble ; ils partagent des femmes, du pain, des plaisanteries, des nuits sous la tente, et surtout le plaisir de vivre à deux. Nulle trace ne subsiste pourtant de cette intimité dans les publications de Du Camp, qui a choisi de se représenter seul en Orient.
Or l'oblitération de Gustave dans les textes de Maxime ne constitue pas une exception, mais bien plutôt la règle : les plus célèbres écrivains français du dix-neuvième siècle se sont également embarqués avec un compagnon de route dont ils ne font pas mention dans les pages qu'ils ont publiées à leur retour d'Orient. Ainsi Nerval a-t-il lui aussi choisi de faire l'impasse sur ses amis Fonfrède et Rogier.
C'est que la solitude orientale, véritable convention littéraire, permet alors aux jeunes artistes de se créer une identité littéraire basée sur l'indépendance et la masculinité, identité jugée indispensable à leur carrière, tant par les écrivains eux-mêmes que par le public.