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La poésie ? C'est l'Homme écartelé et éclaté, la nature mutilée, la vie mise à vif, les yeux rivés sur la souillure du monde, quand bien même ils restent fidèlement sensibles à sa beauté. La poésie est ambivalence. C'est surtout le questionnement intérieur, l'épreuve solitaire à laquelle on ne peut se soustraire, car imposée, orchestrée par un autre moi indéfinissable, forçant admirablement le dialogue tantôt du haut d'une chaire inaccessible, tantôt à même le plancher ou la terre battue.
Et le poète, toujours à la recherche d'un point de vue idéal, d'un équilibre toujours compromis, subit les fluctuations d'une perception en alerte, tel le rivage agressé ou caressé par la vague déferlante ou somnolente de la mer des Caraïbes ! Les tras bitako sont certainement ainsi façonnées, à travers une enfance très tôt mise en question par une déchirure profonde, irréparable, une adolescence intrépide, studieuse néanmoins, empreinte de désenchantements, de raidissement, voire de radicalisation.
Mais c'est aussi l'itinéraire d'un homme face à l'adversité, d'un insulaire afro-amérindien enchaîné à un "continent institutionnel", désuet par fait d'esclavage, de colonialisme. Toutefois, l'équilibre d'un être humain, fût-il produit d'un rude passé colonial est affaire de conviction profonde. C'est ça la voie de la dignité d'Homme.