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L'histoire d'un éternel promeneur solitaire, Jacques Laccarière : une liaison heureuse de plus de vingt ans avec une terre, un peuple et une histoire.
C'est sous les portiques de l'Agora d'Athènes où la foule de ses auditeurs, abritée du soleil, venait écouter Hérodote relater ses voyages, que l'on aimerait lire, ou mieux encore entendre lire, L'été grec.
Car ce livre est une approche vivante, un témoignage passionné, l'histoire d'une liaison heureuse de plus de vingt ans avec une terre, un peuple et une histoire.
L'originalité de l'approche de Jacques Lacarrière réside, littéralement, dans sa démarche.
Tels ces ascètes en quête d'un "homme différent", vivant - ivres de Dieu - aux frontières de la mort.
Et il devient alors évident que ce que cherche sans relâche sur la terre hellène ce promeneur solitaire, il l'a déjà trouvé en lui-même.
A travers le quotidien, les gestes et la langue populaires, dans un style impressionniste où se retrouvent l'harmonie de Sophocle, les chants médiévaux de Digenis, les mémoires du général Makryannis et les Kleftika, ces chants épiques de la guerre d'indépendance, nous passons tout naturellement de l'autre côté du miroir pour retrouver le fil qui relie Eschyle à Séféris, Homère à Elytis et Pindare à Ritsos.
A la manière enfin dont on a dit du printemps 68 français qu'il fut "chaud", on peut parler de la chaleur et du souffle libertaire de L'été grec.
Mais le plus rare peut-être en ce beau livre est que l'exceptionnelle érudition de l'auteur n'ait en rien entamé l'étonnement, la jeunesse et l'acuité de son regard.
Grand Prix de Littérature de l'Académie Française pour l'ensemble de son oeuvre.
Balade hellène
"Il ne faut pas confondre les livres qu'on lit en voyage et ceux qui font voyager". Cette phrase signée André Breton est mise en exergue de L'Été Grec, livre qui appartient plutôt à la seconde catégorie.
Relatant les multiples séjours que Jacques Lacarrière effectua en Grèce entre 1947 et 1966, ce livre est à la fois un voyage dans l'espace et dans le temps. Du mont Athos aux îles grecques en passant par Epidaure, le flâneur qu'est Lacarrière brosse le portrait presque romantique d'une Grèce et de son peuple pas encore encore envahie par l'horreur touristique.
Lire l'Été Grec, c'est aussi percevoir ce qui fait l'essence du voyage et de la manière de le partager aux autres. Car Jacques Lacarrière est l'exact opposé du voyageur contemporain à savoir l' "instagrammeur-voyage". Tandis que l'un collectionne les pays à la mode ("j'ai fait tel pays, j'ai fait tel autre, ..."), l'autre revenait plusieurs fois dans le pays dont il était tombé amoureux avant même d'y mettre les pieds. Tandis que l'un suit les routes balisées reliant aéroports, hôtels et sites touristiques ne croisant que ses alter ego touristes, l'autre se déplaçait au rythme de la marche et bénéficiait de l'hospitalité des gens ordinaires rencontrés sur le chemin. Enfin, tandis que l'un expose son voyage à coups de photos retouchées et standardisées, l'autre utilisait les mots et la prose pour nous faire ressentir sons, odeurs, goûts et matières.
On ne s'étonnera pas que ce livre soit un des titres marquants de la collection Terre Humaine dont l'esprit est de retenir "toute approche qui contribue à une plus large intelligence de l'homme".