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Il se lève tous les jours en début d'après-midi et descend à pied déjeuner au centre-ville de Reykjavik. Il déteste qu'on le dérange pendant ses repas. Il déteste qu'on le dérange tout court. Depuis quelque temps, il a remarqué une présence derrière lui, une silhouette rouge qui le suit et ne semble pas vouloir le lâcher. Il n'en finira donc jamais d'être épié. On l'a pourchassé toute sa vie, on a constamment cherché à lui voler son intimité.
Il n'a donc aucune raison d'être agréable. D'ailleurs, ses imprécations redoublent : les Juifs, les Américains, les Japonais, les Russes en prennent pour leur grade. Ses amis se font de plus en plus rares. Il sait qu'il n'en a plus pour longtemps, quelques semaines, quelques mois peut-être. Il joue là sa dernière partie et son sort, réglé d'avance, est désespéré. Pourtant il ne baisse pas les bras.
Parce qu'il est Robert James Fischer. Bobby Fischer. Le plus grand joueur d'échecs de tous les temps.
En retraçant les derniers jours du champion Bobby Fischer à Reykjavik, dévoilant un destin hors du commun, Pierre-Emmanuel Scherrer signe un roman où nous entrons de plain-pied dans l'intimité de ce personnage complexe et paranoïaque, à la fois citoyen américain et américanophobe, juif et antisémite, génial et puéril.