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Quand Mark Twain débarqua à Odessa pour la première fois en 1867, il fut si surpris par son mélange de nationalités et de religions — un patchwork de Juifs et de Russes, d'Ukrainiens et de Grecs, d'Italiens et d'Allemands — qu'il s'y sentit comme chez lui, en Amérique. La ville n'avait alors pas un siècle... C'est en 1794 que la grande Catherine II chargea son amant Potemkine de faire de ce modeste port à la position stratégique la perle de la mer Noire, au carrefour de l'Europe et de l'Asie.
Plus tard, le duc Armand de Richelieu, descendant du cardinal, perça ses larges avenues et éleva son Opéra à l'italienne. Alexandre Pouchkine y écrivit Eugène Onéguine, tout en séduisant l'épouse du gouverneur, Isaac Babel mit en scène la pègre de ses bas-fonds dans ses Contes d'Odessa, Sergueï Eisenstein tourna sur ses fameux escaliers la mutinerie du Cuirassé Potemkine et Vladimir Jabotinsky devint l'un des pères du sionisme.
Mais c'est aussi à Odessa que se déroulèrent de terribles pogromes et qu'eut lieu, à l'initiative des fascistes roumains à partir de 1941, l'anéantissement de l'une des plus importantes communautés juives d'Europe. En formidable conteur, Charles King fait revivre ici les destins singuliers de tous les émigrés qui ont façonné la riche et bouillonnante identité d'une ville mythique, aujourd'hui la patrie ancestrale de dizaines de milliers d'Américains (quartier Little Odessa à New York), d'Israéliens et de tant d'autres peuples.