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Pourquoi avons-nous tant de mal à changer nos styles de vie alors que plus personne ne peut nier que notre modèle de développement a un impact destructeur sur le plan écologique et social ni douter de l'intensité des violences infligées aux animaux ? Relever ce défi implique de combler l'écart entre la théorie et la pratique en développant une éthique des vertus. Au lieu de se focaliser sur les principes ou sur les conséquences de nos actes, celle-ci s'intéresse à nos motivations concrètes, c'est-à-dire aux représentations et aux affects qui nous poussent à agir.
Quels traits moraux peuvent nous conduire à être sobres et à avoir du plaisir à faire le bien, au lieu d'être constamment déchirés entre le bonheur et le devoir ? L'éthique de la considération prend sa source dans les morales antiques, mais elle rejette leur essentialisme et s'appuie sur l'humilité et sur la vulnérabilité. Alors que Bernard de Clairvaux fait reposer la considération sur une expérience de l'incommensurable supposant la foi, Corine Pelluchon la définit par la transdescendance.
Celle-ci désigne un mouvement d'approfondissement de soi-même permettant au sujet d'éprouver le lien l'unissant aux autres vivants et de transformer la conscience de son appartenance au monde commun en savoir vécu et en engagement. La considération est l'attitude globale sur laquelle les vertus se fondent au cours d'un processus d'individuation dont l'auteur décrit les étapes.
"L’objet de mes soins ce sont les pensées qui assurent la paix de mon âme."
La considération, pour Corine Pelluchon, c'est cette forme d'humilité qui nous rappelle que nous sommes dépendants de cette nature que nous poussons à bout, par le simple fait que nous en sommes une part. En faisant preuve de considération pour ce qui nous entoure, nous ne penserons plus à asservir les autres car nous aurons pris conscience de notre vulnérabilité.
Ce changement de perception, s'il a lieu, est celui qui nous permettra de relever nos défis écologiques.